Rafles de gauche

 

 

Dans les années 70 nous suivions des cours de marxisme qui nous parlaient de paupérisation absolue du prolétariat et de restauration du taux de profits. Nous opinions avec componction sans imaginer que 40 ans après, cela ne serait plus seulement une question théorique, ni une malédiction réservée aux pays dominés, mais se vérifierait jusque dans les "métropoles impérialistes" avec un retour de misère de masse. Jamais nous n'aurions cru une telle prédiction, jamais nous n'aurions imaginé que 7 millions de nos concitoyens "vivraient" autour ou sous le seuil de pauvreté.

Dans les années 75/80 nous nous disions qu'il fallait appeler à voter Mitterrand, que la gauche ce serait différent de la droite. Ô nous n'étions pas naïfs, nous nous disions que Mitterrand ferait la politique que Raymond Barre n'arrivait pas à imposer. Mais nous nous disions quand même qu'on respirerait mieux, que le pire serait atténué, qu'il y aurait des acquis préservés, que les salariés seraient un peu entendus ou auraient un espace pour se faire entendre... maccache, vint le choix monétariste autour de Fabius (futur noniste ?!), le choix de l'Europe de l'Euro, la guerre en Irak, le traité de Maastricht, la main baladeuse, cupide et sans frein du Marché sur toute chose.

Dans les années 2000 nous ne nous disions plus rien de ce genre, nous n'attendions non seulement plus grand chose mais pour tout dire "rien" de la gauche, si ce n'est de nous débarrasser de Sarko et d'être nulle ce qu'elle sait très bien faire désormais avec sa kyrielle d'appointés affamés pour militants. Elle nous a cependant quand même étonné : elle a fait pire que le gnome de droite, elle s'est lancée dans le grand déboulonnage de tout ce qui avait été des marqueurs de la gauche dans ce pays et son Histoire. Autant que le lui permet le budget étriqué de l'état elle s'est évertuée à arroser, arroser patronat, entrepreneurs, rentiers actionnaires sans essayer de donner le change ni donc lâcher le début d'un commencement d'un petit quelque chose pour le peuple toutes catégories confondues hormis celles-là. Elle s'adonne au reniement et à la trahison frénétique (on pourrait dire joyeuse mais cette gauche est à la fois nulle et triste) avec une obstination têtue que la droite si elle avait un tant soit peu d'honnêteté, devrait saluer aujourd'hui.

Mais cela va plus loin, toujours et encore plus loin. Copinage avec les dictatures, aventures guerrières pour l'atome et quelques prés carrés de grands capitalistes "tricolores" en Afrique, ventes d'armes éhontées, étranglement de la Grèce pour l'exemple, plus de vergogne, plus de maquillage, plus de faux semblants. Les bondes sont retirées, ils ne s'arrêtent plus. Maintenant ils glissent dans l'abjection eux qui naguère pleurnichaient encore à propos de Charonne, et se livrent dans les rues de Paris pour flatter on ne sait quelle immondice politique, à ce qu'il faut appeler d'urgence des rafles, de honteuses, brutales, haîneuses, cyniques rafles, traitant comme on traite les nuisibles, des migrants rendus hagards par l'absolue absurdité d'un monde qui a perdu toute boussole humaine.

Dans les années 70 nous pensions que l'Histoire nous mordait la nuque, que Mai 68 avait été une répétition générale et que la Révolution, la vraie était à l'horizon, nous disions aussi que le siècle suivant ce serait Socialisme ou Barbarie.

Hé bien voilà.

 

 

SOURCE / MEDIAPART

 

Tag(s) : #actualités
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