Beaux rivages, de Nina Bouraoui, chez JC Lattès

Depuis La voyeuse interdite en 1991 où son roman eut le prix du Livre Inter, Nina Bouraoui est souvent attendue. Nous avions beaucoup aimé ses premiers romans, comme Garçon manqué ou plus tard Mes mauvaises pensées (prix Renaudot en 2005), et un peu moins ses plus récents. Elle vient de changer d'éditeur et nous revient avec Beaux rivages, chez JC Lattès, une belle réussite sur un sujet pas évident car déjà tellement traité, la fin d'un amour.

 

 

Cela commence comme une histoire simple, comme un film en noir et blanc à la Lelouch, un homme, une femme. Ils s'aimaient, durant huit ans, mais tout a une fin et Adrian annonce son départ. Par un SMS, car une des originalités de ce roman de rupture est qu'il se situe de nos jours, entre deux vagues d'attentats à Paris, ceux de janvier 2015 et ceux du Bataclan. Rupture à l'ère du numérique. Donc trois acteurs principaux dans cette histoire, un homme, Adrian galeriste d'art, une femme A. doubleuse de voix d'actrices, le troisième étant non pas la nouvelle compagne d'Adrian, mais le blog de celle-ci. Un trio pour le moins original... La narratrice va connaître ce que nous avons sans doute tous connus. Peu importe l'âge, le sexe, la condition sociale, la langue, la culture, juste une longue, parfois très longue descente aux enfers. Surtout après huit ans d'amour, de complicité, de projets, de promesses...

 

 

Sujet universel, certes, mais où le "déjà lu" attendait au tournant Nina Bouraoui. Pourtant elle évite avec intelligence ces écueils si prévisibles. Sans nul doute, le talent et la sincérité de ses phrases, si l'on excepte toutefois un bref passage dialogué d'une demi-douzaine de pages. Mais c'est l'ensemble du roman qui sonne juste, qui au fil des pages touche en profondeur le lecteur ou la lectrice. D'autant plus que la narratrice apprend que la nouvelle histoire amoureuse d'Adrian durait déjà en parallèle depuis des mois. Dès lors A. va suivre le blog de sa rivale où celle-ci poste des photographies en forme de message... L'addiction numérique n'est plus loin. Trio infernal où la connexion est source de souffrance.

 

"J'ai écrit Beaux rivages pour tous les quittés du monde."

 

Pas la peine de convoquer Nietzsche pour comprendre que ce qui ne nous tue pas nous renforce. Aimer fait souvent mal, surtout à la fin. Mais la blessure, si profonde soit-elle, un jour cicatrise et la vie prend le dessus. Le terrorisme fait mal, et cela peut aussi durer, mais en toute fin, la douleur sera vaincue et les forces de vie l'emporteront. Nous ne pouvons qu'être en osmose avec les mots de Nina Bouraoui quand elle écrit : "En cela c'est un roman de résistance."

 

Dan29000

 

 

Beaux rivages

Nina Bouraoui

Éditions JC Lattès

2016 / 250 p / 19 euros

 

 

Le site de l'éditeur

 

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Tag(s) : #lectures
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