Depuis quelques années le concept de la cantine scolaire évolue. On a d’abord introduit le goût puis la notion d’hygiène, maintenant quelques cantines effleurent le concept d’éthique en choisissant non seulement d’éduquer les enfants à la qualité des produits qu’ils consomment mais également à la possibilité d’une alimentation différente c’est à dire sans viande. C’est un éveil de la conscience, certaines mairies en prennent le pari.
Nous évoquerons les cas de Saint-Denis et de Six-fours-les-plages, deux municipalités qui, à leur manière, s’engagent sur le terrain de l’éthique à la cantine.
Saint-Denis tout d’abord. La ville offre une cantine scolaire s’orientant de plus en plus vers le produit issu d’agriculture biologique (20% de produits bio atteint en 2016) ou raisonnée avec la consommation de pommes et de poires provenant de moins de 20 kms de la ville.
Deux menus par mois sont absolument végétariens, ceci dans le but d’éduquer les enfants à la consommation d’autres sources de protéines. Des produits locaux ou issus du commerce équitable sont utilisés dans ce menu.
La ville a également remplacé les barquettes jetables par des barquettes lavables, ceci dans le but de diminuer les déchets de plastique.
Enfin Saint-Denis adopte des mesures contre le gaspillage en distribuant tant que faire ce que peut les surplus de repas ou de matières premières à la maison de la Solidarité pour une distribution aux plus démunis.
De belles mesures prises pour une cantine qui se veut respectueuse tout en ayant pour objectif d’améliorer encore son fonctionnement et son impact vis à vis de l’environnement.
Parmi ces mesures parfaitement louables un seul point fait défaut : celui de la provenance de la viande.
En effet nulle part n’est précisé d’où vient la viande que consomment les enfants, idem pour le poisson. C’est le seul point faible du programme et il reste de taille puisque les enfants en consomment journellement. On aimerait savoir que la viande consommée par les enfants provient d’élevages respectueux et d’abattoirs conformes aux normes vétérinaires. Hélas, rien n’est évoqué à ce sujet.
Pour trouver une réelle intention de ce côté là il faut se tourner vers Six-fours les plages. Une proposition d’avenant a été lancée au marché scolaire par le maire et sous l’impulsion du conseiller municipal Erik Tamburi. Ce dernier a demandé à ce que les restaurations scolaires se fournissent uniquement dans les abattoirs conformes aux normes vétérinaires c’est à dire ceux présents sur la liste de l’OABA.
A cela il a rajouté que les œufs consommés par les enfants doivent provenir exclusivement de poules élevées en plein air. Ceci dans le but d’offrir des produits de qualité aux enfants des écoles tout en respectant le bien être animal.
Erik Tamburi a d’ailleurs la ferme intention de convaincre toutes les mairies du Var d’adopter ce principe de sélection et de protection. Parce qu’il est intolérable d’alimenter un marché malsain qui converge vers la mal bouffe et la souffrance animale. Et l’ensemble du conseil municipal a suivi cette proposition approuvée par le maire, Jean-Sébastien Vialatte, en septembre dernier.
Les puristes rétorqueront qu’abattoir et bien être animal sont antagonistes et bien évidemment que c’est un concept paradoxal mais aucune commune ne peut enlever la viande de la restauration scolaire. Même Saint-Denis qui fait l’effort de proposer deux menus végétariens par mois n’a pas enlevé la viande de ses menus quotidiens. Alors et pour le moins faut-il envisager la consommation d’animaux ayant le moins souffert possible avec l’espoir qu’à long terme toute la France suive cette proposition et plus, qu’elle abandonne, de même que le reste du monde, la consommation de viande qui est une ruine économique, éthique et climatique bien plus qu’un atout. D’autant que les protéines végétales ne manquent pas et que leur consommation par l’ensemble du monde permettrait de rétablir l’équilibre nord/ sud c’est à dire supprimer la faim dans le monde. Car notre bétail mange les céréales qui devraient être destinées aux enfants du Tiers-monde. Ainsi ce n’est pas la production agricole qui fait défaut y compris dans les pays pauvres mais tout simplement l’accès à la nourriture. 60% du fourrage (blé, soja, cacahuètes) utilisé par l’élevage industriel est importé du Tiers Monde au détriment des populations locales.
On peut ainsi lire dans le site d’APSARES que « L’augmentation de la consommation de viande et de produits animaux dans des pays comme le Brésil ou la Chine, bien qu’elle reste nettement inférieure à la consommation des pays industrialisés, a des répercussions environnementales considérables. Le nombre de personnes pouvant être nourries par hectare et par an varie de 22 avec des pommes de terres et 19 avec du riz, à seulement 2 personnes avec de l’agneau et 1 personne avec du boeuf. De même, la satisfaction des besoins en eau va constituer un enjeu majeur du XIXème siècle. Or les productions animales nécessitent beaucoup plus d’eau que les végétaux n’en ont besoin. »[1]
Et Jeremy Riflin de rajouter :
« L’ironie du système de production alimentaire est que des millions de consommateurs aisés dans les pays développés meurent de maladies d’opulence (attaques cardiaques, accidents vasculaires cérébraux, diabète, cancers) provoquées par l’excès de viandes provenant d’animaux nourris aux céréales, pendant que les pauvres du Tiers-Monde meurent de maladies de pauvreté dues à l’impossibilité d’accéder aux terres qui leur permettraient de faire pousser des céréales pour nourrir leurs familles. »[2]
En conclusion on ne peut que louer les efforts de ces deux municipalités tout en souhaitant que leurs démarches fassent leur chemin en matière de prosélytisme et d’éveil de conscience. C’est en se plaçant face à ses propres responsabilités que l’humain pourra modifier la courbe du déclin qui le menace. Le chemin reste long et semé d’embûches mais quelques rares élus tentent de le rendre plus propre.
Marie Kern, le 20 novembre 2016
1- Extrait du bulletin d’APSARES association de professionnels de santé pour une alimentation responsable
2- Idem
SOURCE/. LE BLOG DE MARIE KERN, que nous vous conseillons vivement