- 30 mai 2017
- Par Jean-Jacques Birgé
- Blog : Miroir de drame.org
Plutôt enclin à rechercher des musiques qui se rapprochent du cinématographe, entendre que le cut prévaut au développement, ou que la variété des plans supplante les variations du thème, j'ai parfois besoin de calme, d'une tendresse que seule la nuit ou la musique savent produire, du moins certaines nuits et certaines musiques, lorsque la nuit n'est habitée que d'étoiles et que la musique m'y transporte sur un courant d'air. L'enregistrement live à Milan du duo formé par le trompettiste sarde Paolo Fresu et le pianiste américain Uri Caine est de toute évidence un nocturne. Après les albums Things en 2006 et Think en 2009, la complicité de près de 15 ans des deux musiciens continue de caresser les oreilles comme une brise légère.
L'influence de la musique classique que Uri Caine arrangea souvent (Mahler, Wagner, Bach, Schumann, Mozart, Vivaldi...) pour des orchestres à tendance jazz ne s'entend pas seulement ici sur le Menuet en sol mineur de Bach, le troisième mouvement de la première symphonie de Mahler ou La Travagliata, Sino Alla Lorte Mi Protesto, L'Amante Bugiardo de Barbara Strozzi, mais aussi dans les morceaux d'origine pop (Nature Boy d'Eden Ahbez, All I Want de Joni Mitchell, Give Peace A Chance de Lennon) ou jazz (I Loves You Porgy de Gershwin). Paolo Fresu se faufile entre les touches avec l'aisance d'un oiseau de nuit, passant parfois au bugle, encore plus velouté, ou électrifiant l'air en transformant le son avec ses effets électroniques. Je cherche vainement mes mots car la qualité de ce concert est justement de les faire oublier pour laisser la musique nous emporter vers l'éther dont aucun nom ne peut rendre son irréalité tangible.
→ Paolo Fresu & Uri Caine, Two Minuettos, Tŭk Music (Sonodisc/IDOL), 20€, sortie le 30 juin 2017
Le Club est l'espace de libre expression des abonnés de Mediapart. Ses contenus n'engagent pas la rédaction.
SOURCE / MEDIAPART