Utopies réalistes, Rutger Bregman, éditions du Seuil

Parmi la belle avalanche d'essais que cette rentrée littéraire nous réserve, nous avons fait le choix de n'en chroniquer que trois ou quatre avant la fin de l'année. En commençant par un livre-phénomène (23 traductions), celui de Rutger Bregman, Utopies réalistes, publié par les éditions du seuil. L'auteur est un historien hollandais, journaliste pour le magazine en ligne De Correspondent.

 

 

Alors que notre monde est de plus en plus mortifère, sous le signe des guerres, des attentats et du réchauffement climatique, alors qu'en France depuis 1981 se succèdent alternances et cohabitations, en vain, et que le péril FN s’accroît, les déclinistes tiennent le haut du pavé et les vieux partis politiques sont en crise. Dans ce cadre régressif, la lecture de cet essai de Rutger Bregman fait l'effet d'un rayon de soleil permettant enfin un retour vers l'utopie. Lire ou relire Thomas More. La force de cet essai est de démontrer que nous pouvons changer le monde avec une poignée d'idées, dépassant un vieux clivage droite-gauche, en se situant ailleurs. Les fameux Grands soirs, les idéologies du 19e siècle, les formes verticales des partis, tout cela ne fonctionne plus, comme nous le voyons à chaque nouvelle élection. Changer les têtes pour que rien ne change vraiment. L'auteur explique à juste titre, que les grands progrès de civilisation furent d'abord considérés comme utopiques : la fin de l'esclavage, le début de la démocratie, les droits des femmes...

 

Rutger Bregman ne traite que quelques sujets, mais soigneusement choisis, il s'avère que c'est ceux que nous défendons sur ce blog depuis neuf ans maintenant : Le revenu de base universel, la forte réduction du temps de travail (semaine de 15 heures), l'ouverture des frontières, la taxation des flux financiers ou l'éradication de la pauvreté. Vaste programme, direz-vous. Au fil des pages, dans une approche accessible à un large public, l'historien, s'appuyant sur les travaux d'Ester Duflo, Piketty ou David Graeber, démontre le réalisme de ces utopies, preuves à l'appui. Comme avec cette ville canadienne qui a totalement éradiqué la pauvreté, ou en Hollande, Utrecht, expérimentant le revenu de base. Rutger Bregman n'est pas un illuminé, il sait que les obstacles sont nombreux, mais il est pragmatique, faisant appel au courage de chacun, à en finir avec les peurs afin de construire un monde meilleur. Utopiste je vous dis, mais réaliste. Dans un monde de chaos son livre est une belle bouffée d'air frais, sous le signe d'Oscar Wilde : « Le travail est le refuge de gens qui n'ont rien d'autre à faire dans la vie. » Échapper aux vieilles lunes idéologiques, échapper au désespoir, s'ouvrir aux alternatives et lutter pour elles. Un livre surprenant, optimiste, tonifiant que chacun doit lire et méditer.

 

Dan29000

 

Utopies réalistes

Rutger Bregman

Éditions du Seuil

Traduit de l'anglais par Jelia Amrali

2017 / 253 p / 20 euros

 

Le site de l'éditeur

Lire un extrait

 

PRESSE /

Antoine Reverchon Le Monde


«En puisant aux meilleures sources, statistiques et autres ou encore dans une érudition vertigineuse au carrefour de l'histoire, de l'économie et de la philosophie, Rutger Bregman raconte, dans un style enlevé, la lutte contre la pauvreté dans les pays en voie de développement, les perspectives offertes par la robotisation et la numérisation du travail. »

 

Tag(s) : #lectures, #alternatives
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