Le projet de loi pour une immigration maîtrisée, un droit d’asile effectif et une intégration réussie a été adopté en deuxième lecture par l’Assemblée nationale le 26 juillet 2018. Après sa présentation le 21 février en conseil des ministres et depuis son adoption en première lecture le 22 avril, il a connu de nombreuses modifications à la marge. Mais la philosophie du texte reste la même : il est dangereux et consacre une véritable chute de droits pour les personnes étrangères. Analyse du texte par La Cimade
La Cimade dénonçait en février un texte « rédigé par le ministère de l’intérieur sans consultation réelle des acteurs associatifs de terrain » ainsi que « son manque d’équilibre flagrant ». Plus de cinq mois après des vifs débats dans les deux chambres, le texte voté par la majorité présidentielle au parlement n’a pas beaucoup bougé depuis la copie remise par Gérard Collomb en conseil des ministres.
L’Assemblée est revenue sur une version quasi identique à celle qu’elle avait adoptée en première lecture, en faisant siennes certains des durcissements de la droite sénatoriale comme le fait qu’à Mayotte les adolescent·e·s né·e·s et ayant grandi en France ne deviendraient français·es que si l’un de leurs parents résidait régulièrement depuis trois mois lors de leur naissance, ce qui pénalisera fortement ces enfants. Celles et ceux déjà né·e·s aujourd’hui ne deviendront français·es qu’en justifiant du séjour régulier de leurs parents pendant cinq années.
Les autres principales mesures que La Cimade déplore et qui vont considérablement dégrader les conditions des personnes migrantes sont :
- L’allongement de la durée de la rétention administrative jusqu’à 90 jours y compris pour les familles accompagnées d’enfants mineurs ;
- Une intervention du juge des libertés et de la détention dans les quatre jours suivant le placement en rétention.
- L’absence de recours suspensif pour les personnes originaires d’un pays dit « sûr », pour celles qui demandent le réexamen ou qui sont considérées comme présentant un trouble grave à l’ordre public ;
- Le cantonnement des demandeurs d’asile ;
- La systématisation des mesures de bannissement et la multiplication de mesures de surveillance à l’encontre des personnes étrangères ;
- L’extension des possibilités de prononcé d’une interdiction du territoire français ;
- La banalisation des audiences par visio-conférence ;
- La complexification de la procédure de reconnaissance de filiation et le durcissement de l’accès à un titre de séjour pour les parents d’enfants français ;
- Le fichage des mineur·e·s isolé·e·s ;
- La possibilité pour les préfectures de passer outre les avis médicaux dans le cadre de la procédure de régularisation pour raisons de santé.
Étant donné la philosophie générale du projet de loi et son manque d’équilibre flagrant, il ne s’agit pas pour La Cimade d’obtenir des ajustements techniques ou de modifications cosmétiques, mais d’un retrait de ce projet de loi. Ce dossier vise donc à alerter sur les dangers de ce texte qui, par ailleurs, ne répond pas aux enjeux migratoires de notre temps. Au-delà du retrait de ce projet de loi, La Cimade appelle à une autre politique migratoire en totale rupture avec celle menée ces dernières années.
Pour aller plus loin :
- Le projet de loi présenté en conseil des ministres le 21 février 2018
- L’étude d’impact du 20 février 2018
- L’exposé des motifs
- L’avis du Conseil d’État du 15 février 2018
- Mobilisation de La Cimade
- Le texte issu de la commission des lois le 9 avril 2018
- Le texte voté à l’Assemblée nationale le 22 avril 2018 et présenté au Sénat le 6 juin 2018
- Le texte adopté par la commission des lois du Sénat le 6 juin 2018
- Le texte voté par le Sénat le 26 juin 2018
- Le texte adopté en commission des loi le 18 juillet 2018 pour la 2e lecture par l’Assemblée
- Le texte voté en 2e lecture par l’Assemblée nationale le 26 juillet 2018
Ci-dessous le document de décryptage de La Cimade actualisé le 30/07/2018 suite à son adoption en deuxième lecture par l’Assemblée nationale.
SOURCE / LACIMADE.ORG