Résistance Palestinienne au féminin
La résistance Palestinienne au féminin

, par Hayat Boustadimanche 8 mars 2020

« L’humanité ne peut pas vivre avec, dans sa cave,
le cadavre d’un peuple assassiné
. »
Jean Jaurès

 

La Mémoire des massacres de l’Histoire a-t-elle été une leçon pour l’avenir ? A-t-elle empêché leur recommencement ? L’oubli s’installe volontairement.

Qu’en est-il de cet espoir de Jaurès ? Même certains de ses « amis » l’ont apparemment oublié.
Ils soutiennent par leur silence les massacres et les violences indicibles perpétrés en toute impunité par Israël contre les populations palestiniennes : selonl’Agence Média Palestine«  (…) En plus des 200 Palestiniens qui ont été tués, à la fin du mois de janvier 2020 quelque 8 000 manifestants avaient été blessés par des balles réelles, dont 1 500 mineurs et 150 femmes. »
Ils passent sous silence la colonisation par Israël des territoires palestiniens : ce 20 février 2020, « Benyamin Netanyahou a promis la construction de milliers de nouveaux logements dans des quartiers de colonisation à Jérusalem-Est » appuyé par les Etats-Unis qui, en violation des résolutions du Conseil de sécurité de l’ONU [1] »
, considèrent que les colonies israéliennes en Cisjordanie occupée «  ne sont pas contraires au droit international. »

Ce droit international est bafoué par certains de ceux - la même qui l’ont ratifié. Tout est mis en œuvre pour étouffer les voix palestiniennes, celles de l’indépendance, de la liberté et de la résistance contre l’injustice et l’intolérable.

Pour la psychiatre et psychothérapeute palestinienne Samh Jabr « Ce n’est pas en laissant les Israéliens s’en sortir avec leurs crimes et passer au – dessus du droit international que l’Europe peut se repentir de sa culpabilité vis-à-vis de l’holocauste ». [2]

Mais le peuple palestinien a déjà gagné la bataille de l’Histoire par sa résistance et sa dignité que nul ne pourra jamais bafouer. De plus en plus d’Etats contestent les colonies israéliennes et boycottent les produits en provenance des territoires occupés. Les soutiens pour un Etat Palestinien se multiplient, même en Israël.

La Résistance n’a pas de genre, elle se conjugue au féminin comme au masculin. Mais, dans plusieurs conflits coloniaux ou autres, la question des droits des femmes a toujours été « reportée » à plus tard…Suite aux indépendances, encore une fois, cette question n’était pas d’actualité : il fallait d’abord s’attaquer au développement et à la solution des problèmes économiques. Malgré leurs engagements dans les luttes anticoloniales, elles ont été oubliées, l’égalité des droits non reconnue.

Jusqu’à aujourd’hui, dans les pays occidentaux se réclamant de démocratie et de modernité, l’égalité en droits n’est pas effective quand il s’agit de son application pour les femmes malgré les discours de parité. D’autres pays reculent sur cette question. Ils avancent les caractères spécifiques culturels ou cultuels pour « normaliser » l’inégalité des genres (notre religion, nos traditions, nos habitudes…).
Il a toujours fallu des combats sans précédent, des actions d’envergure pour permettre des changements dans ce qui a relevé, relève toujours d’une culture de l’inégalité des genres. Même dans les organisations démocratiques, n’assistons-nous pas parfois à cette « logique » de domination ?

Dans leur combat contre l’occupant israélien, les femmes palestiniennes mènent une résistance exemplaire contre l’occupant tout en luttant pour une place primordiale dans leur société. Pour n’en citer que certaines d’entre elles :
Khitam al – Saafin, présidente de l’Union des femmes palestiniennes fut condamnée en juillet 2017 le même jour que Khalida Jarrar, membre du Conseil Législatif palestinien et militante des droits humains. En mai 2017, 56 femmes étaient emprisonnées. [3]
Khalida Jarrar [4]  , défenseure de la liberté des prisonniers palestiniens au sein d’Addameer, association de soutien aux prisonniers et de défense des droits humains, a purgé 20 mois de prison. Elle fut libérée en février 2019. Huit mois après, le 31 octobre 2019, elle est appréhendée par des soldats israéliens qui ont pris d’assaut son domicile.
Malgré cette violence subie, Khalida Jarrar continue son combat dans les prisons israéliennes : cours sur les droits humains, soutien éducatif des mineurs…

Le 8 mars 2019, les femmes Palestiniennes ont bravé à Gaza l’occupation de leur terre par l’État d’Israël. Mais, en cette journée du 8 mars 2019, elles ont encore assisté à l’assassinat d’un de leurs enfants. « L’occupant israélien  », lit-on dans le bulletin Euro - Palestine de la Coordination des appels pour une paix juste au Proche-Orient « a célébré à sa manière le 8 mars, en tuant un jeune Palestinien de Gaza et en blessant 42 autres personnes qui manifestaient pacifiquement pour célébrer la Journée de la Femme, et notamment la résistance héroïque des femmes palestiniennes. »

La résistance des femmes palestiniennes est exemplaire face à ce climat de terreur bien orchestré et encouragé publiquement par les Etats-Unis ; face au silence de pays occidentaux qui se targuent de démocratie ; face à des pays arabes soutiens des Etats-Unis qui ne veulent pas aborder la question des droits des femmes malgré leur discours comme c’est le cas en Arabie Saoudite : Loujain al Hathloul, Iman al Nafjan et Aziza al Yousef et d’autres militantes torturées et ayant subi des sévices sexuelles. Le pouvoir exige qu’elles ne témoignent pas des tortures subies. Loujain al Hathloul refuse de se taire. Elle est en prison depuis près de 2 ans.
Ce sont ces pays avec lesquels la « France des droits humains » entretient des relations privilégiées.

Médecins, écrivaines, avocates, les femmes palestiniennes luttent sans relâche contre l’occupant et font face aux discriminations instaurées par l’occupant mais aussi face à la violence venant de la société palestinienne (violences conjugales, harcèlements sexuels, traditions patriarcales…). Elles ne baissent pas les bras.
Samh Jabr, psychiatre et psychothérapeute palestinienne déclarait : « Comme dans d’autres pays colonisés, quand les Palestiniens échouent dans leur opposition contre les violences verticales de la puissance occupante, cette violence et cette oppression deviennent horizontales. Elle s’exprime sous la forme de conflits internes, de régression et violences domestiques… »
C’est aussi contre des pratiques archaïques que se battent des femmes palestiniennes. En 2019, des palestiniens, femmes comme hommes, sont descendus dans la rue pour défendre les droits des femmes après le meurtre d’une jeune femme de 21 ans par sa famille qui l’avait battue à mort car elle avait publié sa photo sur Instagram accompagné de son futur fiancé.

Le combat des femmes palestiniennes, leur résistance contre l’occupant est aussi un combat pour l’égalité des droits. Ce combat ne peut être mis au second plan ou remis à « un plus tard » qui a du mal à arriver un jour.

Réclamer l’indépendance n’est-ce pas réclamer la liberté ? Elle ne peut être revendiquée de manière opportuniste au gré du genre. Elle ne devrait pas souffrir de relativisme culturel, cultuel ou de situation. Sinon, la porte est ouverte à la dénaturation des causes justes des peuples dans leur combat contre toutes les formes d’asservissement.

Notes

[1] La résolution 2334 du Conseil de sécurité des Nations unies, adoptée le 23 Décembre 2016 «  exige de nouveau d’Israël qu’il arrête immédiatement et complètement toutes ses activités de peuplement dans le Territoire palestinien occupé, y compris Jérusalem-Est  ».
Le 13 Octobre 1970, l’Assemblée générale de l’ONU avait adopté à une très large majorité, la résolution 2621qui stipule que «  la persistance du colonialisme sous toutes ses formes et dans toutes ses manifestations représente un crime qui constitue une violation de la Charte des Nations Unies, de la Déclaration sur l’octroi de l’indépendance aux pays et aux peuples coloniaux et des principes du droit international .

[2] Source : bulletin n°75 (dernier trimestre 2019) de la publication du CVPR qui a consacré un dossier sur les femmes palestiniennes.
https://plateforme-palestine.org/IM...

[3] Source : Idem 2

[4] Khalida Jarrar est élue au Conseil législatif palestinien sous l’étiquette du Front populaire de libération de la Palestine (FPLP). Elle est membre d’une commission palestinienne chargée de déposer devant la Cour internationale les plaintes et les dossiers relatifs aux crimes israéliens commis à l’encontre des Palestiniens, aux attaques sur Gaza, aux confiscations de terres, à la construction de colonies et aux arrestations arbitraires.

 

SOURCE / REZOCITOYEN.ORG

Tag(s) : #Monde arabe - Israël
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