Communiqué de L’Union Nationale des Associations de Lutte contre le Sida (UNALS) et Act Up-Paris
April 5th, 2011Pénaliser les clients nuit gravement à la santé des prostituéEs
Ce 30 mars 2011, Roselyne Bachelot-Narquin, ministre des Solidarités et de la Cohésion Sociale, s’annonçait « très solennellement » « favorable à la pénalisation des clients » des travailleurSEs du sexe.
Cette mesure est l’objectif affiché de la « Mission d’information parlementaire sur la prostitution en France » dont le rapport est attendu pour le 13 avril. Reniant sa fonction initiale d’analyste objective, cette mission s’avère être un outil permettant à Danielle Bousquet (PS, présidente) et Guy Geoffroy (UMP, rapporteur) d’atteindre leur objectif obsessionnel : la pénalisation du client.
Au mépris de la parole et de l’expertise des premierEs concernéEs, après des auditions qui n’ont servi que de caution démocratique, la ministre a affirmé qu’« il n’existe pas de prostitution libre et consentie » chantant les louanges de l’« exemple suédois », qui amènerait, selon elle, une « diminution de la prostitution et des réseaux de traite des femmes ».
Roselyne Bachelot-Narquin prend donc fait et cause pour une mesure supplémentaire en faveur de la dégradation des conditions de travail des sexworkers, de leur paupérisation et surtout de leur exposition accrue à des IST.
Dès 2002, travailleurSEs du sexe, associations de santé communautaire et associations de lutte contre le sida ont alerté des conséquences désastreuses de la mise en place du délit de racolage passif. Huit ans plus tard, le bilan est tel que nous l’avions prédit : les travailleurSEs du sexe se sont éloignées des structures de prévention, de dépistage et de soins. Les violences à leur encontre et le harcèlement policier ont augmenté et leurs ressources se sont réduites. Cela les oblige à travailler davantage et les incite à céder aux exigences de rapports non-protégés.
S’obstinant à privilégier moralisme et électoralisme au détriment des questions de santé publique, des politiques de tous bords s’entendent aujourd’hui sur une énième législation répressive, cette fois-ci à l’encontre des clientEs. Les conséquences seront identiques : un accroissement de la mobilité et de l’isolement des sexworkers, afin de soustraire leurs clientEs aux contrôles et de pouvoir exercer, une diminution de la clientèle et donc des revenus.
Ancienne ministre de la Santé, Roselyne Bachelot-Narquin est censée maîtriser le volet « santé » de la question du travail du sexe. C’est sous son ministère que les acteurs de la lutte contre le SIDA ont élaboré le « Plan National de Lutte contre le VIH/SIDA et les IST 2010/2014 », qui admet les effets néfastes de la LSI et recommande notamment de « favoriser et adapter l’accès à la prévention » des travailleurSEs du sexe, et de « communiquer et agir auprès des clients ».
C’est sous son ministère également que le Conseil National du sida a rendu son avis « VIH et commerce du sexe : un état des lieux alarmant » , qui fait état de « politiques publiques contradictoires », de « cadre législatif défavorable, peu conforme aux droits des personnes », et préconise de « renforcer les droits ». Sans oublier qu’en 2008, lors de la conférence internationale sur le Sida à Mexico, Roselyne Bachelot-Narquin insistait sur l’importance des actions de prévention auprès des populations les plus vulnérables, comme les TravailleurSEs du Sexe. Elle employait ce terme dans son communiqué et le remplace aujourd’hui par celui de « victimes ».
Même sous l’angle des Solidarités et de la Cohésion Sociale dont elle est désormais en charge, le soutien de Roselyne Bachelot-Narquin à la pénalisation des clients des prostituéEs est inique.
Refuser obstinément des droits et un statut à une minorité, au mépris de la santé publique n’est pas un acte solidaire ou social. S’entêter dans le tout répressif n’a rien de socialement cohérent.
Pénalisation de nos clients: LES TRAVAILLEURS DU SEXE SONT CONTRE !
March 30th, 2011
Si une loi était votée en ce sens cela aggraverait davantage nos conditions de travail, pousserait à travailler dans des endroits encore plus reculés et donc augmenterait les risques de violence contre nous. S’attaquer à nos clients représente aussi une potentielle précarisation.
Surtout c’est renforcer le stigma contre nous. En intervenant dans la sexualité entre adultes consentants, l’Etat nous traiterait ainsi encore davantage comme des mineurs en situation d’incapacité d’exprimer leur propre volonté.
Nous ne voulons pas être « réinséré-es », nous voulons la reconnaissance de nos droits.
Nous ne sommes pas des victimes ou des inadaptés sociaux, nous sommes des travailleurs et travailleuses.
Contact presse:
Maitresse Gilda 0623068701
Isabelle Schweiger
Source : STRASS, Syndicat du travail sexuel