Marchandisation de l’Université : la réforme licence et les Idex

La réforme licence adoptée par le ministère pendant l’été et qu’il entend appliquer dès la rentrée 2012 est un coup de plus porté à l’Université. Elle s’inscrit dans la droite ligne du processus de Bologne avec à la clé une privatisation de l’enseignement conduisant à accroître la sélection sociale au sein de l’Université tout en renforçant l’emprise du patronat sur cette dernière.


Pour déman­te­ler l’Université la stra­té­gie du gou­ver­ne­ment est la LRU.

 

 

 

 

De celle-ci découle d’un côté, les IDEX (Initiatives d’Excellence) qui ont pour objec­tif la créa­tion au niveau natio­nal d’une dizaine de pôles uni­ver­si­tai­res hyper­spé­cia­li­sés et dotés de moyens excep­tion­nels (finan­cés par le grand emprunt) en raison de leur « excel­lence » dans l’objec­tif avoué d’acqué­rir une reconnais­sance au niveau inter­na­tio­nal.

D’un autre côté, le plan licence s’adresse aux facs qui res­te­ront ina­dap­tées à la « com­pé­ti­tion inter­na­tio­nale ». La réforme licence vient donc pro­fes­sion­na­li­ser les for­ma­tions res­tan­tes en les adap­tant au bassin local de l’emploi. Ainsi, on forme d’un côté l’élite natio­nale et inter­na­tio­nale, les grands cer­veaux/cher­cheurs, et de l’autre on forme la main d’œuvre bien « pro­fes­sion­na­li­sée et adap­tée aux besoins du marché ».

Facs d’élite pour les uns, facs pou­belle pour les autres..

Dans les dis­cours du gou­ver­ne­ment au ser­vice des riches et des capi­ta­lis­tes, l’Université est res­pon­sa­ble du chô­mage car elle ne répon­drait pas aux besoins des entre­pri­ses. Mais ce n’est pas l’Université qui enchaine plans de licen­cie­ment sur plans de licen­cie­ment, jette les gens à la rue et dans le chô­mage et qui est inca­pa­ble d’assu­rer un emploi stable et épanouissant à tous et toutes, c’est l’État et le grand patro­nat !

Cadre économique global

L’Université n’est pas déconnec­tée de l’ensem­ble de la société, en ce sens, les logi­ques qui s’y appli­quent sont les même que l’on connaît par­tout ailleurs. Austérité, plans de rigueur, crois­sance, pro­fits, chô­mage, concur­rence, com­pé­ti­ti­vité, flexi­bi­lité.. y sont les maî­tres mots. Ainsi, il n’est pas étonnant que l’OCDE ait expres­sé­ment appelé dans son der­nier rap­port annuel sur l’éducation le gou­ver­ne­ment Français à aug­men­ter les frais d’ins­crip­tion à l’uni­ver­sité. Comme en Angleterre par exem­ple où le gou­ver­ne­ment a triplé les frais de sco­la­rité à l’uni­ver­sité les pas­sant de 3000 livres à 9000 livres (plus de 10000€ !) malgré une forte mobi­li­sa­tion étudiante.

Pour faire passer la pilule de la casse sociale géné­ra­li­sée, les gou­ver­ne­ments du monde entier - la France ne fai­sant pas excep­tion – dési­gnent des boucs émissaires : étranger-e-s, sans-papiers, chô­meurs, pré­cai­res, tra­vailleurs seraient res­pon­sa­bles de tous les maux ou « pro­fi­te­raient du sys­tème ». Ainsi, non contents de détruire la vie de mil­lions de gens, nos diri­geant-e-s ten­tent – dans un ultime mani­fes­ta­tion de leur mépris de classe – de faire culpa­bi­li­ser leurs vic­ti­mes. Car qui peut affir­mer sans honte que le pro­fi­teur-se est le/la tra­vailleur-se et non l’action­naire qui sort plus riche encore de la crise qu’il a pro­vo­quée.

Ne ren­trons pas dans le jeu des diri­geant-e-s qui consiste à nous divi­ser pour mieux régner. L’heure est à la lutte !

La réforme licence

Les objec­tifs avoués de la réforme sont « d’amé­lio­rer l’inser­tion pro­fes­sion­nelle » des étudiants en « pro­fes­sion­na­li­sant » les diplô­mes ; « d’indi­vi­dua­li­ser » les for­ma­tions« en créant des par­cours dif­fé­ren­ciés et »d’aug­men­ter les exi­gen­ces aca­dé­mi­ques".

Cette réforme ampli­fiera donc encore le pro­ces­sus déjà lar­ge­ment avancé de pri­va­ti­sa­tion de l’Université, notam­ment avec la pré­sence de patrons au sein du Conseil d’Administration et pour­sui­vra « l’élitisation » de l’uni­ver­sité en pro­cé­dant à une sélec­tion sociale de fait.

En effet, la pro­fes­sion­na­li­sa­tion des diplô­mes signi­fie en terme concret l’ins­tau­ra­tion de stage(s) dans les cursus, c’est-à-dire la sou­mis­sion - gra­tuite ou à coûts réduits - pen­dant la durée d’études aux besoins des entre­pri­ses. Le contenu théo­ri­que de la licence est ainsi bradé pour four­nir une main d’œuvre mal­léa­ble et à bas coûts aux entre­pri­ses, aug­men­tant un peu plus encore la concur­rence entre les étudiant-e-s/chô­meur-se-s/tra­vailleur-se-s et contrai­gnant ainsi chacun à accep­ter des condi­tions tou­jours plus déplo­ra­bles !

La « pro­fes­sion­na­li­sa­tion » c’est donc bien se sou­met­tre aujourd’hui pour être sûr d’être bien soumis demain !

En outre, l’ins­tau­ra­tion de la « plu­ri­dis­ci­pli­na­rité » verra enté­ri­ner la dis­pa­ri­tion pure et simple des filiè­res les moins ren­ta­bles et les moins adap­tées aux inté­rêts du patro­nal régio­nal. En effet, plutôt que de per­met­tre à tout un chacun d’accé­der à une for­ma­tion de qua­lité de son choix, cri­ti­que et indé­pen­dante, la « plu­ri­dis­ci­pli­na­rité » a en réa­lité pour objec­tif de réa­li­ser des économies d’échelles en met­tant tout le monde dans les mêmes cours ! Ainsi, en homo­gé­néi­sant les for­ma­tions on s’éloigne davan­tage encore de l’ensei­gne­ment cri­ti­que.

Par ailleurs, la « per­son­na­li­sa­tion » des par­cours - c’est-à-dire la créa­tion de par­cours « d’excel­lence » et « de sou­tien » -conduira à indi­vi­dua­li­ser les diplô­mes - c’est-à-dire contrai­re­ment à ce qu’annonce le minis­tère - casser la reconnais­sance par les conven­tions col­lec­ti­ves des diplô­mes et des qua­li­fi­ca­tions pour les rem­pla­cer par un vague « carnet de com­pé­ten­ces », n’offrant aucune garan­tie face aux employeurs/eues.

De plus, le volume horaire des cours en licence sera comme le sou­haite le minis­tère aug­menté, couplé à l’ins­tau­ra­tion de stage(s) dans les cursus, sans aug­men­ta­tion aucune des bour­ses alors que le sala­riat étudiant cons­ti­tue aujourd’hui la pre­mière cause d’échec en licence, l’éviction de l’uni­ver­sité des clas­ses popu­lai­res et des clas­ses les plus défa­vo­ri­sées sera ainsi assu­rée !

Amplifiant par ailleurs les cours sans lien de quel­conque nature avec la spé­cia­lité de l’étudiant - comme des cours de TICE ou de langue - débou­chant sur des cer­ti­fi­cats afin d’acqué­rir un « réfé­ren­tiel de com­pé­ten­ces » dans l’objec­tif avoué de satis­faire les atten­tes des futurs employeur-se-s !

On l’aura com­pris, il ne s’agit plus d’une for­ma­tion mais bien d’un « for­ma­tage » de nos études/de nos vies au marché pour les besoins des entre­pri­ses ! Revaloriser la licence ne signi­fie qu’en réa­lité la reva­lo­ri­ser aux yeux des employeur-se-s !

« La nou­velle licence est inté­grée dans l’envi­ron­ne­ment socio‐é­co­no­mi­que en favo­ri­sant les par­te­na­riats avec l’entre­prise pour la défi­ni­tion de l’offre de for­ma­tion ini­tiale et conti­nue (évaluation des besoins, déve­lop­pe­ment de l’alter­nance au sens large) et en ouvrant plus lar­ge­ment la par­ti­ci­pa­tion des pro­fes­sion­nels aux équipes péda­go­gi­ques et aux jurys d’examen. » dos­sier de presse du minis­tère sur la « nou­velle licence »...

De la néces­sité d’une mobi­li­sa­tion d’ampleur !

Dès aujourd’hui il faut donc se mobi­li­ser pour créer un mou­ve­ment dans les Universités afin de com­bat­tre la réforme licence et les IDEX. Ce mou­ve­ment se devra d’être ouvert sur le reste de la société car les étudiant-e-s sont des tra­vailleur-se-s en for­ma­tion. Les luttes par­tiel­les pour nos inté­rêts sec­to­riels doi­vent fusion­ner en une seule lutte d’ampleur. Nous devons atta­quer toute la poli­ti­que de la classe diri­geante, et scel­ler une large alliance entre les étudiant-e-s, les tra­vailleurs et tra­vailleu­ses, les chô­meurs et les pré­cai­res, qu’ils soient « fran­çais » ou étrangers, avec ou sans-papiers.

Pour cons­truire une mobi­li­sa­tion sociale d’ampleur à la ren­trée, dès main­te­nant, rejoins le mou­ve­ment !

Notre avenir est dans la lutte !

Pour une uni­ver­sité gra­tuite laïque, cri­ti­que et popu­laire !

Contre la réforme licence !

Contre les IDEX !

Contre la sou­mis­sion de nos inté­rêts à une poi­gnée de capi­ta­lis­tes !

Contre les pro­fi­teurs, contre l’escla­vage sala­rié, bri­sons nos chai­nes !

P.-S.

Confédération Nationale du Travail, Fédération Syndicale Étudiante

 

Source : Rebellyon

Tag(s) : #actualités
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