Roms : il ne reste plus rien du bidonville de la Part-Dieu
Cinquante-et-une personnes ont été évacuées, hier matin, par les forces de l'ordre. Une quinzaine a accepté des retours volontaires en Roumanie. Les autres sont
sans solution d'hébergement durable. Le camp a été détruit.
Dans la nuit noire, un cordon de gendarmes mobiles s'est déployé tout autour du bidonville de la rue Paul-Bert (Lyon 3e). A 6 heures du matin, hier, impossible
de s'approcher à moins de 300 mètres du site où 52 roms de nationalité roumaine (27 adultes, 24 enfants), doivent être évacués par les forces de l'ordre. Un
représentant de la préfecture, muet, se faufile vers l'intérieur du camp illégal, suivi par deux camionnettes de sapeurs-pompiers pour une éventuelle
assistance sanitaire. Deux minibus suivent. Au loin, sous le faisceau d'un luminaire, une pelleteuse se met en place à proximité des cabanes. Seuls les
passagers très matinaux du tramway T3 et de Rhônexpress, dont la ligne longe le campement, peuvent entrevoir ce qui se passe. Colère des membres du Collectif
roms de l'agglomération lyonnaise, qui n'ont pu franchir le barrage et s'inquiètent : « Il y a des enfants, des personnes malades ». L'une des
représentantes, Gilberte Renard, tente de forcer le passage, calmement repoussée par un gendarme. Le long de la rue Paul-Bert, des pneus crissent : à l'heure
de rejoindre le travail, des automobilistes s'impatientent à cause du petit bouchon formé par la présence des gendarmes en bordure de route. Mais les regards
se focalisent vite vers l'intérieur du camp. A 7 h 30, le jour s'est levé et l'évacuation commence, sur ce terrain appartenant au conseil général et à Réseau
ferrée de France. Dans le périmètre interdit d'accès, les premières familles entrent dans un minibus à l'arrêt. D'autres sortent à pied par la rue, saluant
les caméras d'un geste de la main. Simona, 25 ans, porte son bébé de neuf mois. Son mari, Covaci, 23 ans, les suit avec une poussette chargée de quelques
couvertures et victuailles. Après une succession d'interviews avec la radio et la télévision, ils s'assoient sous le pont ferroviaire. Elle donne le sein à
son enfant. Eux n'ont pas accepté de passer une nuit à l'hôtel, comme cela vient de leur être proposé. « Je veux un foyer. Et si on va en hôtel, on sera
ensuite renvoyé en Roumanie. Nous voulons rester ici, je n'ai pas de maison là-bas » dit-elle. Premières informations sur les conditions de déroulement de l'évacuation. « La police était très calme », témoigne Simona. « Ils nous ont demandé les papiers d'identité, sans nous pousser. Personne n'a résisté parce qu'il y avait
beaucoup de policiers ». Son bébé tousse. « Il faut des mises à l'abri, il y a des malades, des femmes enceintes, des personnes en bas âge » s'alarme Andrée
Humbertclaude, bénévole à Médecins du Monde. Une trentaine d'autres Roms s'en vont à pied avec leurs baluchons. Le Collectif les accompagnera jusqu'à la Maison
du Rhône voisine pour exiger un logement : « Il n'y a pas de place dans les centres d'hébergement d'urgence ! » Peu avant 9 heures, les deux mini-bus
quittent le bidonville de la rue Paul-Bert. A bord, quinze Roms qui ont accepté l'aide au retour volontaire en Roumanie. Ils doivent rejoindre, en attendant
leur départ, un lieu non précisé. On apprendra plus tard qu'en dehors de ce groupe, une personne se trouvait en situation irrégulière, et devrait être
expulsée. A 9 h 30, les cabanes alignées en contrebas de la voie ferrée sont vides. Les bulldozers peuvent entrer en action. Peu avant midi, le camp de la
rue Paul-Bert est rasé, un an et quelques mois après son apparition.
Nicolas Ballet
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Source : ZPAJOL liste sur les mouvements de sans papiers