Tunisie : La révolution ne fait que commencer

Par Yahia Bounouar de Tunis.

 

 

Contrairement à ce qui se dit dans la majorité des médias occidentaux, la révolution tunisienne n'est pas fini. A Tunis, c'est l'incertitude. Personne ne peut dire, ni prévoir ce que sera le lendemain. Alors que les manifestations se poursuivent un peu partout dans le pays, pour exiger le départ du gouvernement de transition, en coulisse, les ténébreux hommes de mains de l'ancien régime s'activent. Tous les scénarios possibles leur permettant de se recycler, d'une manière ou d'une autre, sont mis en branle. Ils détiennent toujours la réalité du pouvoir avec le chef de l'Etat par intérim, le premier ministre et tous les ministères de souveraineté (intérieur, justice, affaires étrangères, défense). Sous couvert d'une transition légale, qui respecterait la constitution (celle de Ben Ali), ils se maintiennent au pouvoir et maintiennent l'ancien système sécuritaire, en dépit d'une contestation populaire qui ne faiblit pas. Seuls deux partis politiques de l'opposition légale ( le Parti Démocratique Progressiste et le parti Ettajdid) participent à ce gouvernement avec un ministre chacun, ainsi que certaines personnalités « indépendantes ». Les autres s'y refusent et ne reconnaissent pas ce gouvernement. C'est le cas de la puissantes centrale syndicale (UGTT), qui a fait démissionner ses trois ministres le lendemain de leurs nominations, lorsqu'il est clairement apparu que ce gouvernement était entre les mains des anciens collaborateurs de Ben Ali. Pour faire baisser la pression ces derniers ont finit par démissionner du RCD, le parti de Ben Ali, mais personne n'est dupe. Derrière les beaux discours des ex compagnons de Ben Ali, convertis subitement aux valeurs démocratiques, les vieux réflexes réapparaissent déjà, alors que la contestation se poursuit encore. En effet, la police politique continue d'agir, discrètement, mais elle agit. « Ils refusent de comprendre qu'ils n'ont plus le droit de se mêler de la vie politique des citoyens » explique un opposant, qui ne semble pas surpris. « Nous avons fait tomber Ben Ali mais nous n'avons pas encore fait tomber son système » poursuit-il avec inquiétude. Les écoutes téléphoniques de certains opposants ont vite repris, les surveillances, certes beaucoup moins visibles, ont également repris, après quelques jours de répit. Le quotidien La Presse, a dénoncé dans son édition du samedi 22 janvier, un filtrage d'internet, notamment de Facebook. Un jeune artiste qui a créé sur le réseau social un compte « Tunisie, la Suisse Arabe » a été enlevé en pleine rue par la police politique qui l'a interrogé et brutalisé pendant de longues heures. D'autres militants font face, de nouveau aux intimidations et aux menaces de la police politique.

Pendant ce temps, des partis politiques de l'opposition, des personnalités politiques, des membres de l'UGTT, des représentants de la société civile, négocient pour mettre en place une institution extra constitutionnelle, on parle d'un « Conseil de la révolution » - mais le nom peut changer- qui prendrait en charge la transition en chapeautant le gouvernement et en élaborant les lois, notamment la loi électorale, pour préparer les élections, avec comme objectif une assemblée constituante. Toutes la journée de samedi et de ce dimanche, les négociations se poursuivent pour déterminer les différentes étapes, construire un cahier des charges et obtenir l'accord du plus grand nombre.

 

Par Yahia Bounouar

Radio Kalima

Tag(s) : #actualités
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