Selon le dernier chiffre officiel, 70 710 personnes sont incarcérées en France. Outre ses conséquences en termes de surpopulation et de dégradation des conditions de détention, ce record historique rappelle que les pouvoirs publics et les juges privilégient toujours l’enfermement à toute autre réponse pénale.
Depuis que la barre des 60 000 détenus a été atteinte en 2007, nombre de rapports et expertises officiels, repris dans des déclarations gouvernementales, ont envisagé une plus grande maîtrise du recours à l’incarcération. Résultat ? 10 000 détenus supplémentaires en dix ans. Un chiffre qui souligne l’hypocrisie, si ce n’est la vacuité de l’action des différents responsables politiques qui n’ont fait qu’accompagner la spirale de l’inflation carcérale.
Des records de densité de population sont battus, alors même que depuis vingt-cinq ans, 30 000 places de prison supplémentaires ont été construites. À ce jour, le taux moyen d’occupation des maisons d’arrêt, établissements dans lesquels sont hébergés 48 000 détenus, s’établit à 142 %. 53 établissements présentent même des situations extrêmes de sur-occupation, avec une densité supérieure à 150 %. Citons notamment les maisons d’arrêt de la Roche-sur-Yon, Baie-Mahault (en Guadeloupe), Évreux, Laval et Nîmes dont le taux d’occupation avoisine voire dépasse les 200 %.
Les conséquences d’une telle surpopulation sont dramatiques pour les personnes détenues. En juillet, l’administration pénitentiaire annonçait que 1 667 personnes dormaient sur un matelas au sol. Nombre de maisons d’arrêt enferment trois, voire quatre personnes dans 9 m², et ce 22h/24. Dans ces circonstances, les détenus n’ont quasiment aucune possibilité d’accéder à des activités, du travail ou des soins médicaux. De telles conditions d’incarcération, a fortiori dans un contexte de canicule, sont sources de tensions fortes et de situations à risque au sein des établissements.
Le président, qui déclarait au mois de mars[1] que « l’emprisonnement ne cesse d’augmenter parce qu’au fond, cela reste la solution qui contente symboliquement le plus de monde » et qu’il fallait donc « sortir d’une philosophie dans laquelle on a tout pensé par la prison », est aujourd’hui au milieu du gué. Loin de ce discours fort, sa garde des Sceaux proposera à l’automne un projet de loi de réforme qui reste centré sur la prison et qui risque, sous couvert de bonnes intentions et de simplification des procédures, d’accroître encore le recours à l’incarcération. En outre, la construction de 7 000 places de prison supplémentaire d’ici la fin du quinquennat est à l’étude, avec un objectif de 15 000 places d’ici 2027. Nous appelons donc le président à mettre ses paroles réformistes en acte, et à privilégier la déflation carcérale à l’inflation immobilière.
Contact : Pauline De Smet – 01 44 52 88 00 – 07 60 49 19 96
[1] Discours devant les élèves de l’École nationale de l’administration pénitentiaire réunis à Agen le 6 mars 2018.
SOURCE / OIP.ORG