CHINA.jpgQui n'a pas acheté des produits "Made in China", en particulier des vêtements ?

Produits généralement de bonne qualité, malgré quelques ratés ces derniers mois, et surtout produits peu chers. En quelques années, la Chine est devenue l'atelier du monde. Alors il est particulièrement intéressant de savoir quel est le prix de cette réalité pour les travailleurs des usines chinoises.

Bien entendu on se doutait un peu que le prix à payer pour être les plus compétitifs est lourd, très lourd. Mais savoir est une chose, et expérimenter est une autre.

C'est pourquoi ce documentaire qui a failli ne jamais exister est indispensable à voir. Sa réalisation fut interrompue de nombreuses fois par les autorités chinoises peu satisfaites de tolérer une équipe de tournage occidentale. Elle fut d'ailleurs arrêtée, interrogée et des cassettes confisquées.

Le réalisateur, qui est aussi à la caméra, Micha X. Peled travaille dans le documentaire depuis 1992, en production et réalisation, aux USA, en Allemagne (Arte), Grande-Bretagne (Channel four) et France (FR 2). Il fut aussi le fondateur et directeur exécutif de Teddy Bear films, organisation à but non lucratif produisant des documentaires sur les questions de la mondialisation sous un angle critique. China Blue est son cinquième film.

 

"Ce qui me lève le matin, c'est mon indignation. Les sociétés multinationales ne prennent soin de rien. Dominant les médias, elles s'assurent que l'examen sérieux de leurs actions a rarement lieu. Pour moi, la seule réponse appropriée est de faire des films qui exposent ce qu'ils ne veulent pas nous laisser voir."

 

Difficile d'être plus explicite.

Et son film correspond bien à cela. C'est d'ailleurs un peu une suite de son film précédent sur le géant américain Wal-Mart (Store wars : When Wal-Mart comes to town). En effet si le film China Blue est accablant pour les patrons chinois, et pour l'Etat chinois en général, on ne peut bien entendu faire l'économie de la mise en accusation des donneurs d'ordres. Car au-dessus des usines de textile où s'entassent les ouvrières sous-payées, voire parfois pas payées avant des mois, sans horaires fixes, sans salaire minimum, sans droits, parfois sans pauses, empilées dans des dortoirs, sans syndicats, il y a les multinationales occidentales, et en particulier, américaines. Ce sont elles qui imposent les fameux délais  à respecter sous peine de rupture de contrat, elles imposent aussi leurs prix. Dans le film il s'agit de jeans. Le formidable potentiel de nuisances de Wal-Mart, plus grande chaine d'hypermarchés américaine est en partie issu de leurs méthodes leur permettant d'avoir les prix les plus bas dans les pays où ils s'approvisionnent. La formidable mise sous pression des usines chinoises par les multinationales fait que celles-ci ne peuvent garder des coûts bas qu'en enfreignant les lois du travail, toutes les lois du travail. A titre d'exemple, les heures supplémentaires, souvent obligatoires afin d'honorer une commande urgente ne sont pas payées !

Dans l'extrait proposé ci-dessous, une des scènes hallucinantes du film, où un patron explique sans rire, que tous les salariés ont des droits, et où il avoue en prime qu'ils ne sont que des paysans, avec vingt de retard, et ne sont pas autonomes...Un bel exemple de ce que l'on pourrait nommer le mépris de classe, édifiant surtout dans un pays qui se dit toujours, communiste...!


Autre point fort du film, c'est aussi un portrait attachant de Jasmine, seize ans, qui comme des dizaines de millions d'enfants d'agriculteurs chinois, échangea sa vie dans les champs pour un job en usine. La fabrique où nous la suivons est près de Canton. Fabriquant des jeans, Jasmine gagne 0,06 dollars américains par heure, travaillant très souvent sept jours sur sept. L'usine la loge, mal, à  douze dans une chambre, et la nourrit. Tout cela étant ponctionné sur son salaire déjà maigre.

Nos vêtements bon marché ont un prix.

Il est lourd, autant le savoir.

Dans quelques années, la  Chine remplacera les USA comme première puissance mondiale. Difficile de dire dans combien d'années, mais c'est une évidence. Ce décollage ultra rapide  a un prix pour les travailleurs. C'est ce que le film nous rappelle avec justesse.

 

Dan29000

 

China Blue

Ce que cache le "Made in China"

Micha X. Peled

Editions Montparnasse

2011 / 88' / 15 euros

 

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Récompenses  
Sélection officielle du festival du film de Toronto  
Prix des droits de l’homme au festival international du documentaire d’Amsterdam
    Presse 
    « Un formidable témoignage sur les conditions de travail en Chine et une galerie de portraits sensibles et émouvants » Le Monde

     

     

     

     

     

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