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Plusieurs grandes thématiques traversent ce nouveau roman de Stéphane Guibourgé, journaliste, photographe et écrivain, né en 1966. Se déroulant sur trois décennies, ce livre nous permet de voyager avec ses personnages, des sommets alpins au Mexique, de Tanger à la Thaïlande. Ceci au travers de l'étude psychologique assez fine des trois personnages centraux proposés par l'auteur que nous voyons vivre de 1986 à 2009.

 


 

 D'abord il y a Vincent.

Une passion, l'alpinisme, et une autre passion, amoureuse, Anna. Il escalade, une passion comme une fuite, qui lui permet de s'éloigner, provisoirement de son passé, ou même de son présent. Grimper pour combler une faille, une faille intime...

 

 Ensuite, il y a donc Anna.

Elle restaure des fresques, un peu partout dans le monde. Et elle aime Vincent, qui est un peu son point de référence, malgré ses départs et ses retours.

 

 

 Ensuite il y a Mokhtar.

Le père de Vincent. Ouvrier marocain dans une usine. Mokhtar a bien essayé de s'intégrer, par la boxe, mais un jour, il s'est retrouvé  face à des inscriptions, "Les arabes dehors !" Alors il est parti, en abandonnant Vincent.

 

De page en page, nous suivons alors ces trois personnages attachants durant de longues années, au cours de leurs voyages. Bien entendu ces trois destins sont des vies qui se croisent en influant les unes sur les autres. Comment le passé construit le présent, comme les autres nous construisent, comment nous ne pouvons pas vraiment échapper à ce qui hante notre esprit, même au sommet le plus élevé d'une montagne. Le retour vers ce père qui a imposé ce terrible abandon, doit donc se faire un jour. Affronter les dangers de l'altitude et la solitude des sommets, n'est pas chose aisée, mais affronter son passé et la disparition du père, retourné dans son pays d'origine, cela ne s'avère pas plus facile.

 

Cette thématique classique, la quête des origines, est renouvelée ici par la belle sensibilité de l'auteur, une sensibilité mise au service d'une écriture souvent dépouillée, qui est concise et claire, donc agréable à lire, laissant vivre les personnages.


Les années passent donc, et les personnages évoluent ainsi.

 

Un roman qui dégage une belle émotion, celle du temps qui passe, un temps qui parfois peut faire mal. Un roman sensible, un roman sans fard, un peu nostalgique qui tombe bien avec l'arrivée de l'automne, un roman sur la persistance du passé dans notre présent. Que cela soit le passé familial, ou le passé amoureux. L'on peut courir, l'on peut grimper, l'on peut lutter, il demeure là, bien caché en nous, et ressort à un moment ou à un autre.

 

Un roman qui ne peut que donner envie de lire les précédents de cet auteur.

 


 

Dan 29000


 

Le nom de son père

Stéphane Guibourgé

Editions Stock

2011 / 288 p / 19,50 euros

 

 

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EXTRAITS /


 

Les premières lignes de la première page.

 

 "L'été n'en finit plus. La ville brûle. Les teintes du jour se fondent à l'indigo, puis la lumière jaillit encore. Ils ne dorment pas vraiment. Il la prend longtemps, alors vient un moment de stase, un demi-sommeil. Lorsqu'il s'éveille, elle le suce. C'est comme une rêverie. Elle ouvre les yeux  par instants, aperçoit son visage, les paupières closes, les lèvres mordues. Elle continue, glisse sur lui. Il gémit, voila son appel. Le soleil palpite entre les rideaux. Le vent s'en mêle. Une voile gonflée, rougie. Tout est lent. Ils attendent."

 

 

Page 27

 

"La Bac, les gardiens de la paix, les Opj...Depuis quelques mois, ils sont agressifs. Un pays de châteaux forts se met en place. Chacun commence à vivre en reclus, derrière des murs de carton-pâte, des certitudes que les premières épreuves balaieront sans effort. Dans ce pays, au cœur de ces années-là, on a cessé de croire à la vie. Les circulaires du ministère, les gardes à vue, les bavures se succèdent. Les contrôles d'identité sont devenus  routine, le sport favori de la flicaille désœuvrée. La crainte qu'ils inspirent, ce plaisir indigne, leur manière."

Tag(s) : #lectures
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