Lisieux de Big Brother sont braqués sur vous !

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ARTICLE PUBLIE DANS RACAILLES n°65 (déc 12 -janv 13)

A Lisieux, un collectif se bat contre l'acharnement de la Municipalité UMP d'installer une vingtaine de caméras de surveillance dans les rues. Rencontre avec Résistances du Pays d'Auge.

 

Racailles (R) : En quoi consiste le projet de vidéosurveillance dans les rues de Lisieux ?

Résistances du Pays d'Auge (RPA) : A cette heure c'est bien plus qu'un projet. La municipalité de Lisieux a décidé d'installer 19 caméras de surveillance sur la voie publique de la commune avec enregistreur et écrans de contrôle placés au commissariat et à la mairie pour « assurer la protection » des habitants de la ville. Un investissement de 114 000 euros pour moitié financé par l’État.
R : La ville est-elle devenue le Caracas normand ? Y a-t-il une utilité dans ce projet et comment la municipalité le défend-elle ?

RPA : A écouter ou lire le premier magistrat de la ville [NDLR : Bernard Aubril] et ses adjoints, il semblerait que les Lexoviens soient privés de leur « première liberté qu'est la sécurité ». C'est pourquoi la ville a fait le choix d'implanter un dispositif de vidéo dite de protection pour dissuader les auteurs de crimes et délits de passer à l'acte, d'élucider plus rapidement les crimes et délits qui seront malgré tout perpétrés malgré la grande force de dissuasion nouvellement installée et, surtout, de lutter contre le sentiment d'insécurité savamment disséminé depuis de nombreuses années dans l'esprit des électeurs par les mêmes personnes censées les représenter et « régler » les problèmes.
Or la délinquance générale est en diminution dans le Pays d'Auge et à Lisieux en particulier : - 8 % entre 2011 et 2010, soit 1 576 faits contre 1 714 (baisse aussi de 9 % l'année précédente). Dans le détail, la baisse générales'applique à la délinquance de proximité : vols, dégradations et incendies (- 19 %) et aux atteintes aux biens (- 13 %). Pour ce dernier indicateur, les cambriolages ont baissé de 15 %, les vols de véhicules ont diminué de 25 %, les incendies d'origine criminelle de 40 %. En revanche, les escroqueries, particulièrement sur Internet, ont augmenté (+ 17 %) et surtout les atteintes aux personnes (+ 13 %, soit 195 faits contre 172). « Ce sont surtout les violences non crapuleuses, notamment au sein des familles, qui sont en recrudescence. » selon le commandant de police Dominique Garcia en début d'année 2012
Finalement, il faut croire que nous devons vivre dans une véritable jungle urbaine malgré une baisse significative depuis plusieurs années des actes répréhensibles par la loi sans vidéo-surveillance sur la voie publique !!!
R : Qu'en pense la population alors qu'une forte mobilisation citoyenne est engagée ?

RPA : Malgré une mobilisation de plusieurs organisations politiques, syndicales, ONG et celle de notre collectif pour dénoncer la mise en place de la vidéo-surveillance dans la capitale du Pays d'Auge, nous devons reconnaître pour l'heure que les habitants, pour une grande majorité, restent silencieux sur le sujet ou pire s'en désintéressent totalement ; peut-être par habitude d'être filmés sous toutes les coutures dès qu'ils franchissent le pas des temples et succursales de la consommation (ou à leur travail), de visionner à la télévision des programmes de qualité hautement voyeuriste, ou bien encore de jeter en pâture les éléments de leur vie privée sur les réseaux sociaux. Ce qui laisse encore pour l'heure les coudées franches aux initiateurs de cette politique sécuritaire pour mettre en œuvre leur projet et permet, par anticipation, à ceux qui aujourd'hui se sont abstenus d'en profiter confortablement quand l'heure sera venue pour eux de remplacer les premiers. Ceci étant, avec la multiplication des installations, nous sommes certains qu'un plus grand nombre ouvrira les yeux et demandera des comptes aux décideurs.
R : Cette mobilisation permet de réfléchir sur l'inutilité démontrée de ces caméras. Pourquoi les autorités publiques poursuivent-elles coûte que coûte ce flicage ?

RPA : Ces autorités publiques et politiques espèrent probablement que ces installations techniques leur donneront entière satisfaction en matière de résultat électoraux, des échéances locales approchant à grands pas. Plus sérieusement, il est certain que des arguments mercantiles et financiers ont dénaturé leur jugement. Pensent-ils sûrement que la vidéo-surveillance va remplacer le travail humain de terrain, quelle qu’en soit sa nature ? Estiment-ils que l’investissement de départ et les coûts d'entretien représentent des sommes moins élevées que l'emploi de personnels qualifiés pour résoudre les questions liées à la sécurité des biens et des personnes et à la résolution des causes à la délinquance et aux incivilités ? Peut-être n'ont-ils plus le moindre état d’âme à l’égard de cet outil face à l'invocation de la vie privée sur le domaine public, à la liberté de circuler sans être surveillé, héritage de la Révolution Française que nous sommes en train de perdre ? Sont-ils sous l'emprise des chants de sirènes du fantasme technologique, suffisamment encadré aujourd'hui, tentent-ils de rassurer ? Seules ces mêmes autorités pourraient donner des éléments de réponses si elles acceptaient de jouer avec les règles d'une réelle démocratie en organisant des débats contradictoires et la consultation des habitants avant de prendre des décisions de cette nature.

Source, suite et fin ICI
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