Procès Colonna: un témoin accuse les policiers de «fausses preuves» contre Filidori


Par DIDIER ARNAUD

 


Voilà un drôle de témoin au procès d’Yvan Colonna, venu raconter avec simplicité de quelle manière certains policiers, au plus haut niveau, ont triché. C’était un jardinier qui travaillait chez Dominique Mathieu Filidori, accusé à tort d’avoir commandité l’assassinat du préfet Erignac, dans la fameuse «piste agricole», - qui s’est avérée assez fumeuse.

Serge Garracio, 59 ans, blouson noir, jeans, accent rocailleux, est venu parler hier «de la fabrication des preuves» par Roger Marion, ancien responsable de la division antiterroriste à l’époque. Son témoignage, assez fluide, en dit long sur les méthodes policières employées.

Les policiers ont «investi ma maison de façon abominable», explique Garracio à la barre, «saisissant des armes que je détenais légalement, qu’ils ne m’ont d’ailleurs toujours pas restituées». Garracio se souvient d’un détail. Sa belle mère a dit : «Même les Allemands ne nous ont pas traité ainsi

Garracio décrit Marion comme «le maître incontesté» qui faisait tout ce qu’il voulait. Après la première perquisition, Marion revient quelques mois plus tard, avec Eric Battesti, le chef des Renseignements généraux. «Monsieur Marion m’a dit: "voilà je ne peux pas rentrer bredouille, il faut que je trouve quelque chose. Un peu d’explosif, ça m’arrangerait."» Serge Garracio lui rétorque qu’il n’en possède pas. Qu’importe, Marion suggère que cela l’aiderait bien d’en découvrir dans son étang. Et il menace:«Sinon, je t’emballe toi et ta femme.»

«Tu le poses ce soir, demain je le trouve.»

Quelques jours plus tard, selon Garracio, Marion revient avec un «sachet»: «Tu le poses ce soir, demain je le trouve.» Garaccio raconte: «j’avais pas le choix, le lendemain à six heures il était là. Et donc il a trouvé ces fameux explosifs, et Filidori a fait des mois de prison».

Conclusion de Garaccio: «Voilà comment Marion a fabriqué de fausses preuves.» Le président Hervé Stéphan lui fait alors remarquer que Roger Marion a contesté ses dires. «Ça je m’en fous pas mal, répond le témoin. Si j’avais été terroriste, j’aurais eu des explosifs en bon état (pas comme ceux retrouvés ches Filidori, ndlr). Il faut être malade pour faire ça. C’est un malade», tranche Serge Garracio.

Filidori, 63 ans, est justement venu hier matin raconter ses dix-huit mois de prison pour des prunes. Eric Dupont-Moretti, avocat d’Yvan Colonna a précisé qu’il aurait «aimé qu’on présente un mot d’excuse à cet homme incarcéré pour rien». Et lui, Filidori, pourquoi n’a-t-il rien fait contre ces policiers? «Je voulais porter plainte contre Battesti et Marion, mais je n’avais plus les moyens, je suis ruiné».

 

 

Source : Libération

 

Tag(s) : #actualités
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