Tours : on n’en finit pas d’éradiquer la nature au nom du tramway
Tram d’Enfer sur Trame Verte - A propos du cas Tourangeau par un vélorutionnaire tourangeau
Le verdict est tombé en public. Sur l’autel du « développement durable » une allée de 160 arbres dans la
fleur de l’âge va être sacrifiée. « Il faut assurer le passage du tramway ! ». Un Jardin va céder la place à une voie de circulation électrifiée. Les anciennes protestations des riverains, pour
préserver les cèdres de l’avenue de l’Europe et celles des associations et universitaires pour épargner le reste du Bois « classé » de Grandmont ont été totalement oubliées. Elles ne
permettront pas de respecter les arbres, marronniers et érables, sur l’axe de la rue Blaise Pascal et du boulevard De Lattre de Tassigny.
Technocratie et simulacre de démocratie
L’état major municipal récidive donc, il s’obstine dans sa logique du passage en force et confirme l’arbitraire de ses méthodes. Pour les personnes intéressées par ce qui se trame dans la ville
de Tours autour du passage du tramway, les péripéties stériles et formelles de cette réunion rappellent certaines périodes sombre de l’histoire contemporaine. L’instrumentalisation à sens unique
des instances de la démocratie permet de mesurer le degré de concentration du pouvoir par l’oligarchie technique de la ville.
A Tours, comme dans toute les villes, le tramway et surtout son tracé ont été imposés d’autorité. Seule contrainte, organiser un simulacre de concertation avec la population, c’est fait. Dans
l’axe d’une large boulevard sur un plan de la ville, un trait a été fait : « c’est là que passera le tramway ! » Sans état d’âme, cent soixante arbres d’une large allée seront abattus… Par ce
trait fait et imposé d’autorité, l’état major « hors sol » défini aussi dans le même temps les relations de hiérarchie et de subordination, en réduisant la population au statut passif « d’usager
de la ville ». Une décision grave, autant par ses conséquences que par sa procédure, une destruction programmée de la « trame verte » patrimoniale existante ; sans aucun doute, la réalité du
terrain n’a fait l’objet d’aucune discussion. Le bureau politique ne reviendra pas sur son tracé, même pour seulement le décaler, en restant dans la même rue.
Une personne, présente à cette réunion de « démocratie formelle », convoquée par le PCPU en vue d’informer la population de sa décision, décrit ainsi l’atmosphère « Je suis tombé des nues.
On reste dans une logique politique du "on rase tout et on replante" associée à toute "rénovation". Les conseillers municipaux, nombreux dans la salle, semblaient complètement englués dans leurs
certitudes de faire au mieux. Sans me laisser répondre ils ont monopolisé la parole et vanté le respect des arbres et l’exemplarité du tramway de notre ville, sans répondre directement au sujet
posé. Ils ont noyé le poisson. Je me suis pincé pour y croire et je n’ai pu qu’essayer de placer quelques mots pour dire que cette façon de traiter les arbres est une honte pour la ville de
Tours... »
Dans le Parti de la Classe Politique Unifiée, aucune voix ne s’est élevée contre la monstruosité évidente des conséquences du tracé choisie, et à la réunion publique aucune oreille n’a voulu
entendre une autre proposition de tracé. Pire encore, les membres de ce parti, « les conseillers municipaux présents », s’entendaient bruyamment pour censurer cette dissidence au tracé arrêté. Le
Parti Unique de la classe politique décide, agit et ses membres soudés en légion romaine s’affrontent à la population avec une unanimité jamais égalée ; « englués dans leurs certitudes ».
L’abattage de 160 arbres n’a posé aucun problème de conscience à l’ensemble de ces membres et dans cette réunion publique, démagogie et langue de bois ont monopolisé le débat.
Sombre périodes de l’histoire politique contemporaine... Contrairement aux totalitarismes idéologiques des temps anciens où les membres du Parti pouvaient choisir de se taire pour ne pas
perdre leur tête, dans le totalitarisme technocratique, post-idéologique, l’unanimité politique est volontaire et ouvertement exprimée sans contrainte. Dans les deux cas cet unanimisme s’exprime
dans un mépris franc et massif de la population civile. Tous les ingrédients étaient présents pour automatiser les décisions, laminer la protestation. Certitude et aveuglement, aucune âme n’a été
en mesure de percevoir la monstruosité évidente du projet. Aucun ne manquait... Car en plus du mépris de la population, il est maintenant possible aussi de soupçonner sur les données de l’ancien
tracé disponible en ligne, une volonté suspecte de tromperie. Le tracé du tramway diffusé semblait éviter l’allée arborée ...
La Divinité Tramway démystifiée
Pharaonique dans tous ses aspects et haut moment de partenariat public privé, le tramway est un vaste marché public avec un budget colossal imposé à l’ensemble des contribuables. Il est aussi une
mise en chantier prolongée de la ville avec des dépenses d’énergie tout aussi colossales dans un vacarme assourdissant encore infligé aux riverains du tracé. Une concertation publique aurait été
souhaitable… Il est même fort probable qu’avec partout des riverains pour plupart automobilistes, cette concertation aurait facilement obtenu un avis favorable au tracé imposé au détriment des
arbres. Le PCPU aurait pu s’offrir ainsi, sans risque politique, le plaisir de triompher dans une procédure de « démocratie participative ». Il s’en est tout simplement dispensé, pharaonique dans
tous ses aspects le tramway ne peut que s’imposer d’autorité …
Était-il possible de préserver la majorité des 160 arbres de cette allée dans la rue Blaise Pascal et le boulevard De Lattre de Tassigny, par un choix raisonné de tracé ? La réponse est :
clairement Oui, plan à l’appui ! Malheureusement pour ces arbres, le tramway est un moyen de transport aujourd’hui associé à la notion de « développement durable », voir même par extension
abusive à l’écologie. Par cette association il neutralise tout esprit critique y compris chez les « écologistes ». Auréolé de « vert » il peut donc être imposé d’autorité à la population, se
dispenser de toute concertation et peut encore négliger les réalités de terrain pour s’autoriser à raser une allé de 160 arbres dans la fleur de l’âge.
Dans cette ville saturée par l’automobile, toutes les rues arborées sont réquisitionnées d’office pour faire passer coûte que coûte le tramway. Au carrefour de Verdun et sur le boulevard Winston
Churchill, c’est encore sur l’allée arborée qu’est tombé le trait du tramway. En ce lieu de la ville un cèdre de valeur patrimoniale est menacé, planté il y a cinquante ans, il se trouve
maintenant sous le trait du tramway…
Par ces choix de tracé rasant les anciennes allées arborées de la ville, sans égratigner les axes réservés aux voitures, le tramway se révèle dans une de ses nouvelles fonctionnalités politiques
et économiques : sauver la circulation automobile, lui redonner un sens avec un minimum de fluidité. Après avoir chassé de la ville les anciens tramways, la circulation automobile arrivée au
sommet de son monopole du transport, réclame de nouveaux tramways pour se désengorger.
Sauver la manne financière du trafic automobile, les villes modernes ont profondément creusé la terre pour bâtir l’Empire partagé « public privé » du stationnement automobile. Des milliers de
places souterraines attendent avide leurs voitures pour économiquement survivre et échapper au triste sort de catacombes vides des temps modernes…
Sur le plan technique du trafic, ce choix de tracé est logique, pendant toute la duré des travaux il correspond à la perturbation minimum de la circulation automobile. Mais ici, au-delà
des aspects mercantiles, et pratiques il y a aussi un réel conflit de civilisation, totalement insoupçonné des écologistes militants inconditionnel du tramway. La logique politique de ce choix
technocratique de tracé est limpide. Il s’agit de la destruction délibérée d’un vaste espace protégé exclusivement réservé aux marcheurs. Ce qui était un lieu de repos et de convivialité et qui
aurait pu devenir en totalité un Jardin va être asservi au trafic mécanique… Ainsi dans ce large boulevard où huit axes sont attribuées aux voitures pour leur circulation et leur stationnement ;
le tramway vient détruire et prendre la place d’un vaste Jardin. Là où plus d’une dizaine d’espèces d’oiseaux pouvaient vivre et se reproduire en paix dans la ville, le tramway vient détruire la
nature et ajouter deux nouvelles voies de circulation stérile ; dix axes au total, entièrement consacrés à la « mobilité motorisée » sur ce boulevard... L’Amérique de Kafka ...
Avec ce « label vert » par cette association de façade entre tramways et « développement durable », le blindage idéologique est suffisamment puissant pour assurer la bonne conscience et un
unanimisme inébranlable de l’oligarchie technique de la ville. Sous cette bannière « verte » suffisamment opaque pour occulter les fonctionnalités nouvelles du tramway, tout devient permis en
plus du mépris ostentatoire de la population. Les travaux nécessaires au passage du tramway ne se limiteront pas à de simples opérations des terrassements. Ils acquièrent une dimension politique
en s’offrant pour préalables un énième massacre à la tronçonneuse, labellisé « développement durable ».
Lancé sur un train d’enfer, au crie d’assaut « On replantera des arbres !», le tramway continue sa route dévastatrice dans le « Jardin de la France ». En accumulant sur son passage des
cadavres d’arbres par centaines, il est l’instrument labellisé « vert » pour une nouvelle guerre à la biodiversité…
Tours, début juin 2010
Source : Velorution Tours